"Concertation" est-il devenu un mot suspect?

Editorial CSC-EDUC n°170 de juin 2023
Selon le dictionnaire, le mot «concertation» signifie: pratique qui consiste à faire précéder une décision d'une consultation des parties concernées.
On le retrouve dans pas mal d’expressions usuelles et, en matière syndicale, il est souvent associé à «sociale» : on parle alors de démocratie sociale.
La Belgique est particulièrement reconnue pour son système de concertation sociale. Jusque là, tout le monde s’en félicitait.
C’est notamment grâce à cette concertation sociale que des avancées importantes ont été engrangées, dont la plus importante est peut-être le système de sécurité sociale qui protège chaque Belge depuis le jour de sa naissance.
Concerter ne signifie nullement «être d’accord». C’est parfois tout le contraire: c’est parce qu’on se concerte que j’ai l’occasion de dire non. C’est parce qu’on se concerte que j’ai l’occasion de poser des questions. C’est parce qu’on se concerte que j’ai le droit d’argumenter.
Aujourd’hui, et pour de multiples raisons, le mot concertation est devenu suspect lorsqu’il est associé au Comité du même nom : celui qui «pilote» la réforme du Pacte pour un enseignement d’excellence.
Ce n’est pas tant le Pacte qui pose problème, mais la manière dont il est mis en œuvre sur le terrain, engendrant des pressions sur les membres du personnel et une charge de travail démesurée.
Pour la CSC-Enseignement, ce n’est pas en quittant un lieu de concertation que l'on va permettre d’améliorer ces effets pervers.
Par contre, laisser à d’autres le choix du contenu des réformes présente un risque certain. Que diront celles et ceux qui souhaitent nous voir «claquer la porte» lorsque le dossier des rythmes journaliers sera déposé sur la table?
Sans la présence des défenseurs des membres du personnel, certains n’hésiteront pas à en faire des «horaires coupés».
Sont-ils prêts à en prendre le risque? Nous pas, et nous savons pertinemment pourquoi!
Nous avons par contre obtenu des garanties concernant la levée de la confidentialité. Il est en effet inadmissible que nos mandataires ne puissent pas être avertis rapidement des dossiers déposés sur la table du Comité.
Il est compréhensible que certain·e·s se sentent déçu·e·s, voire choqué·e·s, par la décision qui a été prise de rester à la table de la concertation. C’est pourtant l’ADN d’une organisation syndicale.
Chaque fois que nous nous asseyons autour de la table, c’est dans le but de protéger les membres du personnel et leur emploi. Un seul exemple: sans les organisations syndicales, ce sont 37.000.000 d'euros d’économies qui auraient impacté l’enseignement qualifiant.
Sans les organisations syndicales, les membres du personnel auraient été évalués par leurs pairs et auraient perdu leur priorité dès la première mention défavorable.
Effectivement, nous n’obtenons pas tout ce que nous espérons, mais la liste de ce que nous avons pu éviter ou adoucir est longue!
Ceux qui refusent de le reconnaitre manquent d’objectivité. Nous ne leur en voulons pas. Il suffit de nous interroger et nous pourrons leur expliquer!
Que diront-ils lorsqu’il n’y aura plus aucun rempart?
Le sujet est devenu épidermique et il demande un retour à la sérénité et surtout de la confiance.
Comme nous l’avons toujours fait, nous poursuivrons notre travail d’analyse critique et de propositions tout en conservant notre totale liberté de contestation.
C’est ce qui fait notre différence.
Je vous souhaite de bonnes vacances, sereines et reposantes.
Rendez-vous à la rentrée pour de nouveaux défis.
Roland Lahaye, Secrétaire général