Vos droits
bab449ae-2477-46b3-8fca-27c4c5741bd6
https://www.lacsc.be/vos-droits
true
Actualité
59ea6a04-d5cb-49bb-86bf-262457cb04b8
https://www.lacsc.be/actualite
true
Services
c7cddb17-187f-45c2-a0e2-74c299b8792b
https://www.lacsc.be/services
true
S'affilier
abbb02d8-43dd-44b5-ae75-3cd90f78f043
https://www.lacsc.be/affiliation
true
La CSC
c62ac78b-1aa2-4cb9-a33b-59e6fc085fb4
https://www.lacsc.be/la-csc
true
Contact
7f7bdd4f-c079-401e-a1bf-da73e54f00c2
https://www.lacsc.be/contactez-nous/pagecontact
true
Je m'affilie

Enjeux, inconvénients, défis : tout savoir sur le contrat étudiant en Belgique

A l’instar du travail intérimaire, le recours permanent (et non plus principalement pendant les périodes de vacances scolaires) au travail étudiant est de plus en plus fréquent dans les entreprises. Il passe d’ailleurs régulièrement par les agences intérim. Travail étudiant et travail intérimaire deviennent des passages obligés pour accéder à l’emploi. 

Entre 2012 et 2023, le nombre d’étudiants jobistes est passé de 441.749 à 632.672, soit une augmentation de 43%. Sur la même période, le nombre d’heures de travail étudiant a augmenté de 121%. En 2023, il représentait près de 69.225 équivalents temps plein !  

Qu’est-ce qui explique cette forte évolution ? 

Les employeurs font de plus en plus appel aux jobistes pour deux raisons. D’une part, le travail étudiant est une forme de travail qui permet de réduire le « coût salarial »1. En effet, l’employeur n’est pas redevable de cotisations sociales ordinaires (équivalentes à environ 25% des rémunérations octroyées), mais seulement d’une cotisation de solidarité de 5,43%. D’autre part, le travail étudiant est devenu un important facteur de flexibilisation tout au long de l'année. Tout employeur cherche à ne devoir payer la force de travail qu’en fonction du travail à réaliser, au jour le jour. Les étudiants forment une main-d’œuvre malléable, flexible, d’autant plus disponible pour des horaires irréguliers tôt le matin ou tard le soir, ou le dimanche, que les cours qu’ils suivent sont majoritairement donnés en journée et en semaine. Dans certains secteurs, en cas de grève, les employeurs les utilisent pour remplacer les travailleuses grévistes, comme cela s’est produit lors du mouvement de grève historique dans les supermarchés Delhaize en 2023. 


Selon une étude récente (UCLouvain, 2018), les jeunes, quant à eux, préfèrent la sécurité d’emploi à la flexibilité. S’ils acceptent de telles conditions de travail, c’est principalement en raison du fait que le coût des études (en ce compris la vie en kot) est de plus en plus élevé : un coût que les parents salariés peuvent d’autant moins supporter qu’eux-mêmes voient leurs conditions de travail se dégrader. De surcroît, le job étudiant permet de maximiser le salaire « poche ». En effet, il n’y a ni cotisation sociale ordinaire ni précompte professionnel prélevé sur les rémunérations des étudiants ; seule subsiste une cotisation de solidarité de 2,71%. Cela étant, malgré cet avantage personnel, le travail étudiant pose de nombreux problèmes, tant pour la jobiste que pour la société dans son ensemble. 

Quels sont les inconvénients d’un contrat d’étudiant par rapport à un contrat « ordinaire » ? 
Le contrat d’étudiant est un contrat à durée déterminée (CDD) de maximum 12 mois. En pratique, il s’agit souvent de contrats de (très) courte durée sans garantie d’emploi une fois le contrat arrivé à échéance.  

En théorie, le contrat d’étudiant ouvre le droit au salaire garanti en cas de maladie, au paiement des jours fériés survenant dans une certaine période après la fin du contrat et, parfois, à certains avantages sectoriels (par exemple, des primes, des chèques repas). Mais bien souvent, la durée de chaque contrat ne permet pas d’acquérir l’ancienneté nécessaire pour bénéficier de ces droits.  

En outre, le contrat d’étudiant est soumis à des règles spécifiques qui dérogent sur certains points essentiels aux règles applicables aux travailleurs « ordinaires », et cela, en défaveur des étudiants.  

Au niveau interprofessionnel, le salaire minimum des étudiants est inférieur au salaire minimum « ordinaire ». Dans de nombreux secteurs, il existe également des barèmes salariaux « étudiants » inférieurs aux barèmes des travailleurs « ordinaires ».  

+ PUBLICATION | Retrouvez cet article dans notre " Droit de l'employée de mars 2025 "

Les trois premiers jours de travail de l’étudiant sont considérés comme une période d’essai durant laquelle l’employeur peut rompre le contrat sans préavis ni indemnité. Au-delà de cette période, l’employeur peut rompre le contrat avant son terme, moyennant un préavis réduit à 3 jours calendrier (si la durée du contrat est d’un mois ou moins) ou à 7 jours calendrier (si la durée du contrat est de plus d’un mois). 

Pendant la période de travail exonérée de cotisations sociales (voir encart), l’employeur n’est pas obligé d’occuper l’étudiant pour une durée hebdomadaire au moins égale à un tiers du temps plein de référence dans l’entreprise. Durant cette même période, les jobistes n’ont pas droit à des congés légaux ni à un pécule de vacances. Leurs prestations n’ouvrent pas l’accès aux indemnités en cas d’incapacité de travail, aux allocations de chômage et à la pension ! Bref, un job étudiant n’apporte aucune protection sociale. 

Un contrat d’étudiant peut-il être requalifié en CDI ? 
Si l’employeur commet certaines fautes, le contrat d’étudiant doit effectivement être considéré comme un CDI. Le contrat d’étudiant doit être un contrat écrit, comprenant les mentions obligatoires prévues par la loi, rédigé dans la langue requise et signé au plus tard au moment où l’étudiant débute effectivement les prestations prévues au contrat. A défaut d’écrit ou à défaut de mentions concernant les dates de début et de fin de contrat, l’horaire de travail ou la référence à l’horaire applicable figurant dans le règlement de travail, les règles applicables au CDI s’appliquent à l’employeur ! Cela signifie notamment que si les relations de travail prennent fin, l’employeur doit verser une indemnité compensatoire de préavis, calculée sur la base de l’ancienneté ininterrompue de l’étudiant auprès du même employeur (quel que soit le nombre de contrats successifs conclus). 

Quels sont les enjeux collectifs du travail étudiant ? 
Le job étudiant est un job intermittent, instable et précaire. D’autant plus qu’on le rencontre le plus souvent dans de petites entreprises, sans appui syndical. Le fait qu’il soit devenu une norme sociale et qu’il se généralise sur l’ensemble de l’année soulève d’importantes questions de société. 

Premièrement, le travail étudiant contribue à miner le financement de la Sécurité sociale et donc à fragiliser la solidarité générale. Le total des rémunérations octroyées à des jobistes, sur la période 2012-2023, a augmenté de 195%, pour atteindre désormais plus de 2 milliards d’euros. Si les employeurs devaient garder le même nombre d’étudiants, leur verser le même montant de rémunération, mais payer des cotisations sociales de l’ordre de 25% (au lieu de 5,43%), ce seraient plus de 370 millions d’euros supplémentaires qui viendraient renflouer les caisses de la Sécu ! 

Deuxièmement, la croissance continue du travail étudiant contribue à banaliser la relation de travail « à l’appel » ou « 0 heure ». La logique patronale est d’utiliser cette flexibilité pour elle-même, mais aussi pour justifier le nivellement par le bas des droits des travailleurs « ordinaires ». Dans certains secteurs, les contrats d’étudiant sont tellement nombreux qu’ils viennent logiquement remplacer des contrats « stables ». Cette situation renforce les inégalités sociales : les plus pauvres supportant proportionnellement un coût plus grand pour payer leurs études, ils acceptent donc des boulots à n’importe quel prix, ils triment… Et passent parfois tellement de temps à travailler qu’ils mettent leurs études en danger, au risque de se retrouver sans qualification, condamnés au chômage ou à continuer à accepter de petits jobs précaires sur un « marché de l’emploi » où ils seront concurrencés… par des étudiants ! C’est un cercle vicieux. 

Ce n’est pas aux étudiants à soi-disant « travailler plus pour gagner plus ». Les solutions sont collectives : elles passent par la diminution du coût des études, l’augmentation des salaires, l’octroi d’une (meilleure) rémunération et d’une (véritable) protection sociale pour les stagiaires et les jeunes travailleurs. 

 

1 Nous mettons des guillemets car, en réalité, ce sont les salariées qui produisent la valeur : leur travail n’est pas un coût.  

 

Le job étudiant (exonéré de cotisations sociales) en quelques dates :
  • 1978 : création du contrat d’étudiant avec 23 jours
  • 2005 : 23 jours en été et 23 autres jours le reste de l’année
  • 2012 : 50 jours tout au long de l’année
  • 2017 : 475 heures
  • 2023 : 600 heures (mesure temporaire)
Attention, au 1er janvier 2025, le quota exonéré est redescendu à 475h ! L’accord de la coalition Arizona prévoit cependant de pérenniser un quota de 650h, de doubler le plafond fiscal pour rester à charge de ses parents (qui passerait à 12.000€), et de fixer l’âge minimal pour le travail étudiant à 15 ans (quand bien même, semble-t-il, l’étudiant n’aurait pas encore suivi les deux premières années de l’enseignement secondaire).