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Travailler à temps plein devient un privilège

Le travail à temps plein devient un privilège

Auteur: Bart Vannetelbosch.

Date de parution: 23 février 2025

L’accord de gouvernement Arizona ouvre la porte à des contrats "zéro heure", ou au moins à des "contrats de demi-heure", en Belgique. Dans le même temps, les Pays-Bas et le Royaume-Uni font tout pour freiner ce type de contrats. On ignore encore jusqu’où iront les choses en Belgique, car l’accord de gouvernement entend à la fois maintenir et supprimer la règle du un tiers.

Nous aspirons à plus de contrats fixes pour les travailleurs. Cette phrase figure littéralement dans l’accord de gouvernement du gouvernement néerlandais actuel, peu progressiste. Ce denier poursuit ainsi la politique du gouvernement précédent, qui avait déjà fortement limité l’utilisation de contrats « zéro heure ». Par ailleurs, le parti travailliste britannique, qui a largement remporté les élections, met enfin un frein à ces contrats avec l’Employment Rights Bill 2024. 

L’accord de gouvernement Arizona ne suit pas du tout cette tendance: l’obligation d’une durée minimale de travail hebdomadaire correspondant à au moins un tiers d’un horaire complet est supprimée. Avec l’annualisation du temps de travail ou des horaires « accordéon », le gouvernement ouvre la porte aux contrats zéro heure, ou du moins aux contrats de demi-heure en Belgique. Pour être clair : ni le Royaume-Uni ni les Pays-Bas n’ont ou n’ont eu de législation autorisant explicitement le recours aux contrats zéro heure. L’absence d’une durée de travail minimale obligatoire permettait aux employeurs de conclure des contrats sans heures fixes. Ils pouvaient ensuite demander à leurs salariés de travailler à certains moments, à sa convenance à lui. L’accord de gouvernement comporte également une autre disposition : tant que le travailleur preste au moins trois heures une fois qu’il a été appelé, l’employeur a rempli ses obligations. En raison de l’annualisation du temps de travail, l’employeur n’a ensuite pas besoin d’appeler ses travailleurs pendant des mois. 

Le fonctionnement de ce système est illustré par l’augmentation explosive des contrats zéro heure aux Pays-Bas et au Royaume-Uni à partir de la fin des années 1990. Il suffit qu’un acteur important dans un secteur commence à utiliser de tels contrats pour que les employeurs concurrents copient ce modèle d’entreprise. En 2013, le détaillant britannique de vêtements de sport Sports Direct a donné des contrats zéro heure à pas moins de 20.000 de ses 23.000 travailleurs, après quoi les concurrents ont adopté cette pratique. Sports Direct a finalement renoncé aux contrats zéro heure après des actions syndicales, des manifestations et des procédures judiciaires, avant même que le Parti travailliste ne puisse fermer la porte. 

Il est difficile de prévoir jusqu'où s'ouvrira la porte en Belgique, car l’accord de gouvernement maintient l’interdiction des contrats sur appel. Pourtant, cette interdiction est en réalité déjà en place car c’est précisément la règle du 1/3 temps, qui empêche aujourd’hui les contrats sur appel – à l’exception des flexi-jobs. L'accord de gouvernement entend-il à la fois maintenir et supprimer cette règle? Le Employment Rights Bill 2024 britannique, actuellement en attente d’une troisième lecture à la Chambre des communes, impose aux employeurs de garantir un nombre d’heures de travail par trimestre. La directive européenne relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles exige depuis 2019 que tous les Etats membres adoptent des mesures contre les abus liés aux contrats zéro heure. En Belgique, cette exigence est aujourd’hui couverte par la règle du 1/3- temps. Si cette règle venait à disparaître, une nouvelle disposition anti-abus devra impérativement la remplacer.

En attendant, l’accord de gouvernement prévoit également une réforme de notre système de sécurité sociale, axée sur des emplois supérieurs à un mi-temps. Les travailleurs cumulant plusieurs emplois inférieurs à 1/3-temps, même pour plusieurs employeurs, risquent d’avoir beaucoup de mal à atteindre les 156 jours travaillés requis. Dans certains cas, ils n’acquerront par conséquent aucun droit. La discrimination de ce groupe cible dans la sécurité sociale sera un fameux casse-tête pour la Cour constitutionnelle et/ou la Cour de justice. 
 
La fragmentation du marché du travail due à la généralisation des flexi-jobs sera de toute façon un problème pour les prochains gouvernements. Espérons que le gouvernement et le parlement actuels éviteront d’aggraver la situation avec des contrats sur appel.  Car la limitation du chômage dans le temps menace aussi de pousser un groupe de demandeurs d’emploi vers ce type de contrats hyper-flexibles qui ne permettent pas d’acquérir un revenu suffisamment stable.