Élargir et améliorer le tarif social
Élargir et améliorer le tarif social
Le baromètre de la précarité énergétique offre de nouvelles perspectives.
Auteur: Bart Vannetelbosch
10/07/2024
Un ménage en situation de pauvreté énergétique traverse de grosses difficultés. Sa facture énergétique est trop élevée comparativement au revenu dont il dispose. Bon nombre de ces ménages accumulent des dettes. D’autres se distinguent par une consommation d’énergie anormalement faible, un signe qu’ils se privent du confort de base pour payer l’énergie nécessaire à la satisfaction de leurs nécessités vitales. La pauvreté énergétique a augmenté de 7 points de pourcentage aux pires moments de la crise énergétique (2022). Elle concerne plus d’un ménage belge sur 5 (environ 15% en Flandre et 30% en Wallonie et à Bruxelles). Telles sont les conclusions du baromètre annuel de la précarité énergétique commandité par la Fondation Roi Baudouin.
Les chercheurs s’attendaient à une augmentation plus radicale. L’élargissement du groupe de bénéficiaires du tarif social, en raison de la pandémie, a très bien protégé 400.000 ménages supplémentaires contre la crise énergétique. La proportion de ménages en situation de pauvreté énergétique a même diminué parmi les ménages aux revenus les plus faibles, malgré l’explosion des tarifs commerciaux au plus fort de la crise. En 2022, 65,7% des ménages étaient en situation de pauvreté énergétique, contre 73% en 2021. Plusieurs facteurs expliquent cette diminution. D’abord, l’élargissement du groupe de bénéficiaires du tarif social, sur la base de leurs revenus. Ensuite, le plafonnement de ce tarif et la réduction de la TVA sur la facture énergétique, de 21% à 6%. Toutefois, le gouvernement fédéral a réduit les mesures d’aide pour la facture énergétique. S’il a maintenu la TVA sur l’énergie à 6%, ce taux s’accompagne dans certains cas d’une accise supplémentaire de quelque 20 euros par mois. De plus, il a brutalement supprimé l’extension du groupe de bénéficiaires du tarif social.
Le baromètre de la précarité énergétique est très clair. De très vastes groupes à risques pourraient à nouveau être confrontés à de gros problèmes si, par exemple, la situation du marché énergétique européen est pire l’hiver prochain que l’hiver dernier. En 2022, la précarité énergétique concernait 2 ménages sur 5 (40,2%) parmi ceux qui n’ont pas de revenus du travail, 37,4% des familles monoparentales, 45,5% des ménages qui vivent dans des logements sociaux, et un peu moins de 38% des isolés. Cette situation est absolument injuste!
L’application et l’extension du tarif social de l’énergie, basé sur les revenus, s’est avérée être une bonne mesure politique. Pour de nombreux ménages, elle n’a pourtant pas suffi, d’autant qu’ils ne bénéficiaient pas d’aides suffisantes pour améliorer la performance énergétique de leur logement. Ici aussi, il conviendra de renforcer le rôle de la collectivité. L’extension du tarif social de l’énergie présentait un autre défaut : une différence de quelques euros dans les revenus du ménage suffisait pour rendre obligatoire l’application des tarifs commerciaux. Lorsque les prix de l’énergie sont élevés, cette situation crée des pièges aux revenus. Une réforme doit lutter contre ce piège aux revenus. En outre, la prise en charge totale et l’octroi aussi automatique que possible doivent éviter que le droit individuel ne soit pas exercé. De plus, il faut se rapprocher autant que possible de la situation de revenus réelle des ayants-droits potentiels.
L’association “Onze Taal” a déclaré que l’expression “energie-armoede” (pauvreté énergétique) était le mot de l’année en 2022. Si les prix du marché continuent d’augmenter, ce qui est probable, le prochain gouvernement devra faire en sorte de réduire autant que possible le nombre de gens pour qui cette expression évoque une douloureuse réalité.