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La gratuité des transports en commun: une idée qui fait son chemin

La gratuité totale ou partielle des transports collectifs est une piste envisagée pour atteindre nos objectifs de neutralité climatique en 2050. Mais selon quelles modalités?  Et comment la financer? Ces derniers mois, la CSC wallonne a mené le débat avec ses militant.e.s. Résumé des enjeux avec François Sana, conseiller au service d’études de la CSC. 

La gratuité des transports en commun pour désengorger les routes, c’est une idée qui n’est pas neuve. Pourquoi revient-elle en force?  

C’est évidemment lié à l’urgence climatique: il faut savoir que le secteur du transport est responsable d’une bonne part des émissions de gaz à effet de serre. En Wallonie, il émet à lui seul un quart du total des émissions de GES, ce qui le place en seconde position juste après l’industrie. Or, les transports collectifs sont, après la marche et le vélo, les modes de déplacement les moins émetteurs de CO2. Une voiture moyenne émet 104 grammes de CO2 par passager-kilomètre, alors qu’un bus en émet 68 grammes et un tram 14 grammes. Alors, oui, incontestablement, la gratuité pourrait être un moyen de diminuer nos émissions pour autant qu’elle s’accompagne d’un véritable report modal, c’est-à-dire que les gens laissent tomber leur voiture pour privilégier les transports en commun. 

Par ailleurs, nous nous sommes collectivement engagés à respecter les ODD (objectifs de développement durable) de l’ONU à l’horizon 2030. Une des cibles des ODD est la suivante: «Assurer l’accès de tous à des systèmes de transport sûrs, accessibles et viables, à un coût abordable, en améliorant la sécurité routière, notamment en développant les transports publics, une attention particulière devant être accordée aux besoins des personnes en situation vulnérable, des femmes, des enfants, des personnes handicapées et des personnes âgées.» L’instauration de la gratuité pourrait concrétiser en partie cet engagement. 

La gratuité, c’est aussi un moyen de lutter contre les inégalités…

Oui, car ce sont majoritairement les gens les moins aisés qui prennent le plus le bus aujourd’hui. Ce seraient donc eux qui a priori bénéficieraient le plus de la gratuité. La gratuité a aussi un autre grand avantage: elle améliore l’accès pratique aux transports en commun. Elle permet en effet de ne plus se soucier d’avoir suffisamment d’argent sur soi, de ne plus penser à prendre son titre de transport, de ne pas passer de temps à rendre la monnaie… Tout est plus simple. 

Cette simplicité serait appréciable pour tous, mais elle prendrait un sens plus profond chez les personnes défavorisées. Elles n’auront plus besoin de calculer si l’abonnement ou les titres de transports peuvent entrer dans leur budget, plus besoin d’effectuer des démarches pour bénéficier d’un tarif réduit, plus besoin de regrouper ou de limiter les déplacements… C’est un facteur qui peut contribuer à améliorer la vie sociale, et aussi l’accès à l’emploi, aux formations, aux soins de santé, à la culture… 

Moins de trafic automobile, n’est-ce pas aussi plus de bien-être pour tous? 

Moins de trafic automobile va de pair avec l’amélioration de la qualité de l’air que nous respirons. Et ce n’est pas négligeable car en Belgique, environ 11.000 personnes meurent chaque année prématurément à cause de la pollution atmosphérique. Cela aurait évidemment aussi un effet positif sur les accidents de la route et l’insécurité routière, y compris pour les piétons et les cyclistes.
Y aura-t-il davantage d’incivilités? Certains craignent que les gens considèrent que ce qui n’est pas payant n’a pas de valeur et donc, n’est pas respecté. Pourtant, les expériences françaises tendent plutôt à démontrer l'inverse. A Dunkerque, comme à Aubagne et à Châteauroux, les détériorations du matériel ont baissé de 60% lors de l'expérience pilote durant les week-ends. Des bus davantage remplis augmentent le contrôle social et font ainsi diminuer les incivilités et le vandalisme.

Quelles leçons ont été tirées des expériences de gratuité des transports en commun menées dans plusieurs villes? 

On observe une augmentation générale de leur fréquentation lors du passage à la gratuité. On observe également un report modal de la voiture vers les transports en commun. Ainsi, par exemple, à Aubagne, 63% des trajets causés par la gratuité auraient été effectué en voiture s’ils n’étaient pas gratuits. A Dunkerque, le report modal de la voiture vers les transports en communs a été estimé à 24%.

Un certain report modal des piétons et des cyclistes peut aussi avoir lieu. Autrement dit, des personnes qui se déplaçaient auparavant à pied ou à vélo effectuent certains trajets en transport en communs lorsque ceux-ci deviennent gratuits.

Concrètement, comment les travailleurs de ces secteurs voient ce principe de gratuité? 

Certains chauffeurs de bus, en France, dans les villes qui ont mises en place la gratuité, craignaient une dégradation de leurs rapports avec les usagers. Après plusieurs années d’expérience, on constate que presque tous les chauffeurs sont satisfaits désormais car ils ne doivent plus passer leur temps à contrôler les usagers et peuvent se concentrer sur leur vrai métier: conduire. Le stress dû aux paiements et contrôles disparaît. Ils considèrent généralement que leurs conditions de travail se sont améliorées.

Reste la question du financement. Qui devra payer la note? 

La proposition inscrite dans la DPR wallonne est de rendre gratuits les TEC pour les personnes âgées de moins de 25 ans, de plus de 65 ans ainsi que les personnes défavorisées. Sa mise en œuvre coûterait 42 millions d’euros par an. La gratuité totale des TEC a, quant à elle, été chiffrée à 113,5 millions d’euros par an. Soit moins d’1% des dépenses de la Wallonie.

Une piste alternative de financement serait de s’inspirer du versement transport français et de faire contribuer les entreprises au financement de la gratuité des TEC. Les entreprises financent déjà en partie le transport de leurs travailleurs en Belgique. 

Quel est le sentiment général qui ressort de la consultation interne organisée par la CSC? Et quels sont les points d’attention mis en avant? 

Le sentiment général est que la gratuité des transports en commun est une belle idée que nous devrions soutenir. Néanmoins, beaucoup de militants nous ont rappelé que pas mal d’endroits en Wallonie ne sont pas ou peu desservis par des transports en commun. Il conviendrait donc de développer en premier lieu l’offre de transports en commun avant  (ou parallèlement) de les rendre gratuits. En effet, si l’on veut que la gratuité se traduise par un véritable report modal, il faut évidemment que les transports en commun soient organisés de telle sorte qu’ils représentent une réelle alternative à la voiture, ce qui est encore loin d’être le cas, surtout dans les zones rurales ! Lié à cela, il faudrait revoir complètement l’aménagement de notre territoire de sorte que l’accès aux biens de base et services de proximité soit facilité. 
Beaucoup de militants ont aussi regretté qu’il n’existait pas d’étude globale chiffrant les coûts et les bénéfices d’un système de transports en commun efficace sur le territoire wallon. En l’absence d’une telle étude, il est difficile de se prononcer de façon précise sur le financement des transports en commun.