Le chômage temporaire concerne énormément de travailleurs depuis le début de la crise du coronavirus. Pour des raisons sanitaires ou économiques, plus d’un million de salariés en a bénéficié durant les mois de mars, avril et mai 2020. Début novembre, le Gouvernement fédéral a rouvert grand les vannes de ce régime vu l’aggravation de la crise. Vous rêvez d’en savoir plus ? Suivez le guide, et merci d’éteindre vos GSMs.
Définition : chômage temporaire (n.m.)
Le chômage temporaire est un mécanisme de suspension du contrat de travail. Cette suspension peut être justifiée par plusieurs motifs et, le plus souvent, il s’agit des difficultés économiques de l’entreprise. Durant la suspension, le travailleur perçoit alors une allocation de chômage qui lui est versée par l’Office National de l’Emploi (ONEm). Ce dispositif de droit social est crucial : il permet à une entreprise confrontée à un ralentissement ou à un arrêt de son activité d’éviter les licenciements. En plaçant temporairement à charge de la Sécurité sociale tout ou partie de ses travailleurs, l’employeur en crise peut donc sauver son entreprise et in fine ses emplois.
Le chômage temporaire “coronavirus”
Il existe plusieurs régimes de chômage temporaire. Le plus connu est sans doute le chômage temporaire pour raisons économiques (" chômage économique "), accessible aux entreprises qui rencontrent des difficultés économiques. Mais celui dont on a le plus parlé depuis mars, c’est le chômage temporaire pour cause de force majeure (" chômage pour force majeure "), accessible aux entreprises confrontées à un évènement imprévisible et insurmontable qui a un impact sur leur activité. Mais depuis mars, on parle surtout beaucoup du " chômage coronavirus ". En réalité, le Gouvernement fédéral a remanié le chômage pour force majeure pour le rendre plus accessible et plus généreux durant la crise, et l’a renommé " chômage temporaire coronavirus ".
Qui a accès au chômage temporaire coronavirus ?
Le chômage temporaire coronavirus est accessible pour cinq situations différentes :
1. Fermeture sur ordre du Gouvernement : il s’agit des nombreux commerces et services fermés à la fin du mois d’octobre par les autorités publiques.
2. Difficultés économiques : une entreprise voit ses commandes, sa production ou son chiffre d’affaires diminuer. Ces difficultés ne doivent pas être démontrées à l’Onem entre le 1er octobre 2020 et le 31 mars 2021.
3. Quarantaine : cela concerne deux groupes.
a. Les travailleurs qui ont eu un contact rapproché avec une personne (collègue ou privé) testée positive au coronavirus.
b. Les travailleurs qui reviennent d’un séjour à l’étranger dans une zone rouge (ou orange et qui choisissent la quarantaine), sauf si la zone était rouge lors du départ, auquel cas l’Onem n’indemnise pas. Dans tous les cas, si vous pouvez télétravailler, alors vous travaillez à domicile et vous percevez votre rémunération normalement, il n’y a pas de raison de vous mettre au chômage temporaire.
4. Enfant sans crèche, classe, école ou centre d’accueil : si la crèche, la classe, l’école ou le centre d’accueil de votre enfant est fermé pour cause de quarantaine imposée suite à une contamination au coronavirus, vous avez droit au chômage temporaire. Il s’agit d’un droit que votre employeur ne peut pas vous refuser (même s’il a vraiment besoin de vous).
5. Enfant en quarantaine : si votre enfant a eu un contact rapproché avec une personne testée positive au coronavirus, vous avez droit au chômage temporaire. Il s’agit aussi d’un droit que votre employeur ne peut pas vous refuser.
Quels droits sociaux ont
les " chômeurs temporaires " ?
Le chômage temporaire coronavirus vous confère au moins quatre droits sociaux :
1. Allocation : vous percevez une allocation de chômage qui s’élève à 70% de votre salaire brut plafonné à 2.754,76€ par mois. Sur cette allocation, votre bureau de chômage prélèvera 15% au titre de précompte professionnel. En net, vous recevez donc une somme pouvant aller jusqu’à 1.639,08€.
2. Complément journalier : vous percevez, en plus, un complément de 5,63€ par jour de chômage temporaire, à charge de l’Onem.
3. Suspension de préavis : le chômage temporaire suspend les délais de préavis de licenciement en cours. Vous n’êtes donc pas pénalisé dans votre départ si jamais votre employeur vous place au chômage temporaire.
4. Assimilation pour les vacances annuelles et la pension : le chômage temporaire est assimilé à des jours de travail pour le calcul de vos vacances annuelles de l’année prochaine et de votre pension de retraite. Vous ne perdrez pas de jour de congé à cause de ça, ni de droit à la pension.
Par ailleurs, il est bon de rappeler que le chômage temporaire n’impose pas d’obligation de recherche d’emploi. Puisque vous avez déjà un contrat de travail (même si vous êtes en préavis de licenciement suspendu par le chômage), vous n’êtes pas soumis au devoir de " disponibilité active ", vous pouvez simplement prendre du temps pour vous, votre famille et votre chez-vous. Inutile de préciser que le télétravail pour votre employeur est interdit en chômage temporaire. Par contre, il est possible de consacrer ce temps libre à un autre travail, salarié ou indépendant, mais ces jours d’activité seront décomptés de vos jours de chômage temporaire.
Quelles formalités devez-vous accomplir ?
Pour bénéficier du chômage temporaire, vous devez vous adresser au bureau de chômage CSC le plus proche de chez vous. Vous devez par ailleurs remplir le formulaire simplifié " C.3.2-Travailleur-Corona "disponible sur internet. Quant au délai, votre demande d'allocations doit parvenir au bureau du chômage au plus tard à la fin du deuxième mois suivant celui au cours duquel vous êtes mis en chômage temporaire.
Pour les situations 3, 4 et 5 ci-dessus, il faudra également apporter à votre employeur la preuve de la mise en quarantaine ou de la fermeture de la crèche, de la classe, de l’école ou du centre d’accueil. La quarantaine peut être prouvée, soit, par un certificat médical de mise en quarantaine, soit, par un sms du contact tracing. La fermeture de la crèche, de la classe, de l’école ou du centre d’accueil est prouvée par une attestation officielle délivrée par l’établissement en question.
Et à l’avenir ?
Le chômage temporaire est un système qui précarise temporairement les travailleurs pour sauvegarder durablement leur emploi. Certes, il n’empêchera pas une hausse du chômage en Belgique du fait de la crise économique en cours. Mais il s’agit d’un filet de sécurité important. Aux États-Unis où n’existe pas de dispositif équivalent, les premiers mois de crise ont fait perdre leur emploi à près de trente millions de travailleurs, un peu comme si, chez nous, un million de travailleurs s’étaient retrouvés sans emploi. Le chômage temporaire fait partie intégrante de la branche Chômage de notre Sécurité sociale. Ce filet de sécurité, c’est notamment nous, les travailleurs, qui le finançons avec nos cotisations sociales prélevées sur nos salaires. La Sécurité sociale manque actuellement de moyens, notamment pour financer les branches Santé et Pensions. Les négociations collectives autour de l’accord interprofessionnel 2021-2022 (voir l' " Actu interpro ", page 6) mèneront peut-être à des augmentations de salaires, et donc de cotisations sociales. Mobilisons-nous pour renforcer notre Sécurité sociale afin d’affronter les crises à venir sous le soleil de la solidarité.
François-Xavier Lievens